Un reportage d’Isabelle Rimbert paru sur Reporterre.
Condamnés en 2013 à quinze jours de prison avec sursis pour s’être promenés nus devant les forces de l’ordre, deux militants anti-aéroport de Notre-Dame-des-Landes ont comparu en appel. « Il y a un problème de liberté d’expression par rapport à un acte symbolique », martèle leur avocat. « Outrage », ou « geste poétique » ?
Soutenus par une centaine de militants bravant le froid matinal, Erwan et Elise, les « Camille à poil », comparaissaient mercredi 7 janvier devant la cour d’appel de Rennes. En mars 2013, le tribunal de Saint Nazaire les avait condamnés à quinze jours de prison avec sursis pour s’être dénudés devant les gendarmes en novembre 2012, lors de la vaine tentative d’évacuation de la Zad de Notre-Dame-des-Landes.
L’avocat des prévenus a axé sa plaidoirie sur la définition, imprécise selon lui, de l’outrage par l’article 433.5 du code pénal, et le fait que cet article n’a jamais été soumis au contrôle du conseil constitutionnel. « Un outrage qui est mal défini vient sanctionner un délit d’opinion », a plaidé l’avocat. « Les éléments constitutifs de l’outrage par geste sont flous, la définition légale du délit n’est pas claire. De plus, l’outrage est-il dans le geste ou dans le ressenti de la personne qui se sent outragée ? »
Selon la jurisprudence, le lancer d’œufs, le renvoi de bombes lacrymogènes ou les crachats ont été qualifiés d’outrage. Pas la nudité, a ajouté l’avocat qui met en avant la portée symbolique du geste, évoquant au passage le célèbre tableau de Delacroix, dans lequel la Liberté guidant le peuple avance dépoitraillée.
« Il s’agit d’une condamnation pour l’exemple, et il y a un problème de liberté d’expression par rapport à un acte symbolique », a-t-il martelé. Pour lui, il y a là matière à une QPC, question prioritaire de constitutionnalité, procédure juridique de contrôle de constitutionnalité sur une loi promulguée.
Ces arguments ont été jugés « de faible portée » par l’avocat général, pour qui l’article en question est « conforme à la constitution », et ne donne pas lieu à une QPC. Au terme du délibéré, le président de la cour a donné raison au parquet, refusant de soumettre la question à la cour de cassation « faute de caractère sérieux ».
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Crédit photographique : Reporterre.